Le container, définit par le Larousse comme étant une “caisse de dimensions normalisées utilisée pour la manutention, le stockage ou le transport de matières ou de lots d’objets dont elle permet de simplifier l’emballage”, s’est rapidement imposée comme indispensable au sein du secteur de transport de marchandises. Présents par centaine dans les ports du monde entier, il est aujourd’hui courant de les voir dans d’autres environnements : sur des chantiers, aux abords de centres commerciaux, en bord de plage et même dans des quartiers résidentiels ou des petits villages de campagne. En effet, l’utilisation du container maritime s’est largement démocratisée et cette boîte en acier est devenue, au fil du temps, un matériau ayant une place importante au sein de l’architecture. Largement détourné de son utilisation première, le container maritime est de plus en plus transformé, que ça soit en commerces, restaurants, bars, bureaux, ou encore en maisons containers.
Le container maritime ou l’avènement de la mondialisation
Depuis très longtemps, il existe des boîtes créées pour contenir et transporter des aliments d’un point A à un point B. Seulement ces containers, étaient d’une matière et d’une forme différentes des containers que l’on connaît aujourd’hui. À l’époque de la révolution industrielle, ces boîtes étaient faites de bois, connue sous le nom de Conex Box, et avaient chacune une forme différente, ce qui posait de nombreux problèmes, notamment en termes de sécurité. En effet, les caisses étant peu résistantes, elles pouvaient rapidement être endommagées, détruisant par la même occasion les cargaisons. Pour pallier ce problème, certaines entreprises de transports maritimes ont alors imaginé des caisses en métal, plus résistantes, mais encore une fois, les caisses avaient toutes une taille, une forme et un système d’accroche différent, ce qui compliquait énormément leur chargement et leur déchargement. Mais en 1956, une nouvelle innovation voit le jour, et va révolutionner le monde du transport maritime.
The Conex Box [1]
Début des années 1900 : débarquement de vrac au Port de San Francisco [2]
Malcom Mc Lean, le pionnier du transport maritime conteneurisé
Quelques années auparavant, Malcom Mc Lean, alors jeune entrepreneur à la tête d’une entreprise de transport routier de marchandises « McLean Trucking Compagny », observait ses cargaisons être chargées et déchargées pièce par pièce. Trouvant que cette étape prenait beaucoup trop de temps, Mc Lean a voulu trouver un moyen permettant de faciliter le chargement et le déchargement des marchandises afin de gagner du temps et de l’argent. Une idée lui vint rapidement en tête : la standardisation. C’est ainsi, qu’il imagina le container maritime comme on le connaît aujourd’hui, c’est-à-dire un parallélépipède rectangle fait en acier, pour qu’il soit robuste, aux dimensions normalisées, mais il se heurta rapidement aux réticences des entreprises de transport maritime, car la logistique liée au transport non conteneurisée était très lucrative.
Lorsqu’en 1955, il eut assez d’argent, il racheta une entreprise de transport maritime « Pan-Atlantic Steamship Corporation », mais il fut poursuivi en justice pour « Monopole de transport », car il possédait à la fois une entreprise de transport maritime et de transport terrestre. Il décida donc de ventre son entreprise de transport routier pour se consacrer entièrement à son idée de transport maritime conteneurisé. A peine un an plus tard, le 26 avril 1956, le premier « porte-conteneurs », nommé l’Ideal-X, parti du port de Newark, avec à son bord 58 containers maritimes chargés par des grues, pour rejoindre le port d’Houston. Au final, le coût du chargement lui est revenu à 15,8 cents la tonne, contre 5,83 dollars pour du fret en vrac, une aubaine !
Au fil du temps, cette nouvelle manière d’appréhender le transport maritime séduit de plus en plus d’entreprises. En 1974, afin de poursuivre sur la voie de la normalisation, les containers furent standardisés par l’ISO 668, impliquant ainsi une uniformisation à l’échelle mondiale du conteneur et l’obligation, pour toutes les entreprises réticentes d’utiliser ce type de container conforme aux nouvelles réglementations et propice à une organisation normée du transport.[3]
Les prémices de la revalorisation du container maritime
En 1989, le 8 août, l’histoire du conteneur maritime prend un tout autre tournant. En effet, Phillip C. Clark, dépose le premier brevet pour transformer un conteneur maritime en conteneur habitable. Les nombreuses qualités du conteneur maritime qui ont su séduire le secteur du transport maritime peuvent également être transposables aux domaines de la construction et de l’architecture. En effet, le conteneur, grâce à l’acier corten, est très robuste, il peut donc facilement résister aux intempéries, tremblements de terre, ou encore au feu. Il peut être également facilement transformé puisqu’il est constitué d’un seul matériau, l’acier, qui permet de le découper ou de le souder afin de lui apporter des modifications sans perdre les qualités de sa structure autoportante. Sa structure en acier corten lui permet également d’être empilé sur plusieurs niveaux, pouvant ainsi facilement créer les étages d’une maison. Enfin, le conteneur maritime est facilement transportable grâce à ses dimensions normées. Avec ces différentes caractéristiques, le conteneur maritime va séduire les spécialistes du domaine de l’architecture modulaire : « le conteneur maritime étant déjà produit en masse, mobile et international, il s’agit par sa nature d’une brique élémentaire omniprésente de l’architecture qui se verra nommée par la suite architecture de conteneurs. »[5].
Schéma issu du brevet déposé par Phillip C. Clark [6]
La naissance de l’architecture container ou cargotecture
Petit à petit, le container maritime s’est fait une place au sein des secteurs de la construction et de l’architecture. En effet, dans un premier temps, les containers étaient beaucoup utilisés pour réaliser des logements d’urgence et temporaires, notamment pour aider les populations faisant face à des catastrophes naturelles ou encore pour aider des réfugiés. Par la suite, les containers sont apparus plus fréquemment dans l’architecture, en effet, les architectes ont multiplié les projets à base de containers afin de proposer des espaces intérieurs ouverts et très vastes : de nombreuses maisons containers ont été créées telle que la Redondo Beach House en Californie de l’architecte Peter DeMaria réalisée à l’aide de 8 conteneurs maritimes laissés apparents. D’autres architectes, ont fait le choix de n’utiliser que la structure du conteneur puis de le recouvrir d’un bardage.
Le container s’est par la suite largement démocratisé, répondant aux enjeux environnementaux et devenant une alternative à la construction traditionnelle. En effet, contrairement aux bâtiments construits en béton et utilisant énormément de ressources naturelles, le container maritime est une structure à part entière, limitant ainsi l’utilisation de ces ressources. Il a donc rapidement intégré la construction industrialisée et hors-site. Les containers sont alors transformés dans des ateliers de production avant d’être transportés sur le chantier de construction pour être assemblés. Cette construction en hors-site permet alors de mieux contrôler la qualité, de réduire les coûts de construction ainsi que les délais grâce à la fabrication et l’assemblage en usine, et permet notamment de construire de manière plus durable en réduisant l’utilisation des ressources naturelles, comme l’eau et le sable, beaucoup utilisés dans la construction traditionnelle.[7]
Les avantages d’une maison container
Aujourd’hui, de plus en plus de maisons sont construites à partir de containers maritimes partout dans le monde, mais quels sont réellement les avantages de posséder une maison en conteneurs ?
SA SOLIDITÉ
Fabriqué à partir d’acier corten, les conteneurs maritimes sont très résistants aux conditions atmosphériques. Chaque paroi du conteneur est faite d’acier corten, rendant sa structure 4 à 5 fois plus solide qu’une construction traditionnelle en béton.
SA RAPIDITÉ DE CONSTRUCTION
Contrairement à une maison construite traditionnellement, c’est-à-dire montée en béton sur le chantier et devant donc faire face aux intempéries pouvant interrompre le chantier, la maison container est réalisée en atelier de production, puis installée et assemblée sur le chantier. Ce type de construction hors-site, permet donc à la maison container d’être réalisée en quelques mois seulement contre 1 an pour une maison traditionnelle. Pour les auto-constructeurs, qui réalisent eux-mêmes leur maison container, cette dernière sera construite directement sur le chantier, mais laisse tout de même un avantage. En effet, les conteneurs maritimes ont déjà une structure, c’est-à-dire qu’une fois les containers livrés sur le terrain, la structure de la maison est là, il ne restera plus qu’à faire les découpes, et s’occuper des autres postes comme la pose des fenêtres, l’isolation, le raccordement à l’eau, etc.
SON ASPECT ÉCOLOGIQUE
Construire sa maison à partir de containers maritimes permet de les recycler et de les revaloriser, permettant ainsi à des containers abandonnés dans les ports de bénéficier d’une seconde vie. De plus, une maison ayant une structure en conteneur, n’utilise pas de ressources naturelles comme le sable et l’eau nécessaire à la fabrication du béton.
SA MODULARITÉ
Les containers peuvent être assemblés de différentes manières selon votre choix : disposés côte à côte, empilés ou encore juxtaposés, les choix sont multiples !
SA MOBILITÉ
Les conteneurs maritimes sont facilement déplaçables et peuvent être transportés n’importe, ce qui rend donc la maison container elle aussi mobile !
Exemples concrets de maisons en containers maritimes
Le container maritime a donc, au fil du temps, été détourné de sa fonction première. D’une simple boîte en acier servant au transport de marchandises, le container est apparu comme l’alternative idéale à la construction de maisons traditionnelles. Depuis plusieurs années, de nombreuses maisons construites à base de containers maritimes ont vu le jour, et cela, partout dans le monde. Découvrez donc ces maisons pas comme les autres, bâties à partir d’un matériau recyclé et revalorisé : le container maritime.
Des maisons réalisées par des professionnels …
La maison container de Patrick Partouche
La première maison container que nous avons décidé de vous présenter, est la célèbre maison construite par l’architecte Patrick Partouche. Composée de 8 containers maritimes, cette maison familiale de 240 m² a beaucoup attisé la curiosité. Située dans le nord de la France à Lille, cette maison est décrite par son constructeur comme « généreuse », il explique que via cette construction originale, il a voulu démontrer que « les conteneurs ne sont pas des boîtes que l’on empile, mais un matériau source d’opportunités ». Cette jolie maison a été construite en hors-site dans l’atelier de production de l’architecte où les conteneurs ont été aménagés, isolés, découpés, équipés d’ouvertures, puis livrés sur le terrain, pour une maison qui sera ensuite montée en à peine 3 jours !
Les 8 containers ont été empilés sur deux niveaux, et d’immenses baies vitrées ont été installées aux extrémités de chaque conteneur, afin d’avoir une maison très lumineuse. Au sol, le parquet d’origine a été conservé, poncé et peint. Les portes des containers ont également été gardées et servent de volets, de portes ou de pare-soleil. Au rez-de-chaussée, on retrouve le séjour, la cuisine, le garage, le WC et la buanderie. À l’étage se trouve quatre belles chambres, un bureau, la salle de bain, la salle d’eau, ainsi qu’un second WC.
Pour Patrick Partouche « on peut tout faire avec des conteneurs, mais pas n’importe quoi. »
La maison container de James et Rachel Briggs
Située aux environs de Kialla, au nord de Victoria en Australie, cette impressionnante maison a été construite à partir de 7 containers maritimes. La maison est composée d’un étage central avec plusieurs espaces communs et de trois chambres. Elle dispose également d’espaces autonomes situés dans les containers aux extrémités de la maison. Pour accueillir les invités de manière autonome, une suite parentale a été aménagée, elle est surélevée sur quatre colonnes étroites, et accessible par une passerelle en verre, fermée, qui mène également à un espace de divertissement sur le toit avec des vues imprenables sur le paysage environnant.
Pour cette sublime maison, le couple a dépensé 750 000 dollars et a été finaliste au concours de la « Conception architecturale de l’année » aux Australian Construction Awards.
Un loft construit à partir de 21 containers maritimes à New York
Le célèbre cabinet d’architecture Lot-Ek a réalisé cette incroyable maison à partir de 21 conteneurs maritimes empilés. L’originalité de cette construction hors du commun en plein cœur de New York ? Certains containers ont été découpés en biais pour donner plus de dynamisme à la structure ! À l’intérieur, on retrouve un grand espace de vie regroupant le salon, séparé de la salle à manger, et de la cuisine par une imposante cheminée. On y retrouve également plusieurs chambres dont une suite parentale, de grandes salles de bain, une salle de cinéma, une bibliothèque, et un bureau.
Cette célèbre maison est connue sous le nom « Carroll House » est considérée comme une preuve qu’une maison entière peut être construite à partir de conteneurs, c’est une assurance de concept pour la ville de New York.
Les jolies maisons de l’entreprise Green Habitat
Green Habitat est une entreprise française spécialisée dans la construction de maisons en containers maritimes. Depuis 2015, l’entreprise a réalisé des dizaines de maisons en containers maritimes aux styles très différents. Composées d’un ou plusieurs containers, les maisons sont toutes très modernes avec un toit plat et peuvent être livrées clés en main.
… mais également auto-construites par des particuliers
La maison container auto-construite par Capucine et Florent
Situé en Franche-Comté, le couple a auto-construit une belle maison de 145 m² à partir de 6 containers maritimes. Il aura fallu 9 mois de travaux au total pour le couple pour terminer leur maison et réaliser toutes les étapes de construction de A à Z : découpes, isolation, renfort, raccordements, etc. La maison dispose donc d’un bureau, d’une cuisine ouverte tout équipée donnant sur un grand salon, d’une belle chambre avec salle de bain.
Un studio container 100% autonome
Laura et Kévin ont transformé un container maritime 40 pieds high cube en un beau studio de 30 m² qui a la particularité d’être 100% autonome ! Il leur aura fallu à peine 4 mois pour concrétiser leur projet. À l’intérieur, le studio est composé d’une cuisine, d’une salle de bain et d’un coin avec un grand lit. Pour le rendre autonome, Laura et Kevin ont installé 6 panneaux solaires, reliés à 3 batteries.
[1] https://en.wikipedia.org/wiki/Conex_box
[2] https://libcom.org/article/effects-automation-lives-longshoremen
[3]Delphine Legrand.L’habitatconteneur.Architecture,aménagementdel’espace.2016.dumas-01389150, p12
[4] https://www.joc.com/maritime-news/container-lines/flashback-slide-show-container-shipping-turns-60_20160426.html
[5] Delphine Legrand.L’habitatconteneur.Architecture,aménagementdel’espace.2016.dumas-01389150, p.16
[6] https://patents.google.com/patent/US4854094
[7] https://netbox-containers.fr/lhistoire-de-la-construction-hors-site-dans-le-milieu-scolaire/